Covid-19, les managers sur le pont !

« Les espèces qui survivent ne sont pas les espèces les plus fortes, ni les plus intelligentes, mais celles qui s’adaptent le mieux aux changements. »

La référence à Charles Darwin est assez facile en cette période de perte de repères mais cette citation illustre parfaitement le chaos auquel ont dû faire face les Managers depuis le début du confinement. On pourrait aussi citer Tancrède dans le Guépard avec son célèbre « Il faut que tout change pour que rien ne change » mettant également en exergue la nécessité de s’adapter afin de durer. Cette adaptabilité dont on parlait déjà tant avant le 16 mars est aujourd’hui, à l’instar de l’agilité, bien plus qu’un buzz word : c’est une réalité pour les Managers qui doivent faire face à une situation sans précédent, mettant à rude épreuve leur leadership. Pas d’autre choix pour eux que d’ajuster leur management en temps réel.

Quand la figure de l’encadrant n’est plus celle de “celui qui sait”

Manager a souvent ressemblé à du tâtonnement depuis le début de ce confinement, une visibilité claire faisant défaut à tous. Pour autant, faut-il attendre d’être sûr pour prendre une décision et proposer un cap, ou privilégier l’action, quitte à revenir plus tard sur ses positions ? A la mi-mars, tout s’est précipité en quelques heures. Après s’être assurés que les collaborateurs pouvaient travailler à distance ou être mis en chômage partiel, une large part des Managers ont dû rassurer des équipes inquiètes, faire passer les messages parfois contradictoires du Top Management, réajuster les priorités, et monter en première ligne, pour gérer les relations avec les clients ou fournisseurs aux côtés de leurs collaborateurs.

Des Managers sur tous les fronts donc, qui dans ce contexte inédit communiquent sans relâche, mais aussi de fait, de manière approximative. « Pourquoi dis-tu l’inverse de ce que tu as dit hier ? » me demande un collaborateur. Le contexte évoluant au fil des décisions du gouvernement ou du comité de direction force la plupart des Managers à revenir sur ce qu’ils ont annoncé quelques jours plus tôt. Comment rester crédibles quand la situation nous rend vulnérables ? La solution réside dans l’authenticité dans la manière de communiquer, et dans l’humilité dont on peut faire preuve, devant une situation que l’on ne peut maîtriser tout à fait. Partager son ressenti et faire preuve d’une empathie sincère sont les deux piliers d’une communication authentique.

La confiance à question dans le contexte inédit du Coronavirus

De même, le curseur doit être mis sur la confiance et non le contrôle même si bon nombre de « chefs » auront tendance à vouloir s’assurer que les travailleurs à distance ne passent pas leur temps devant des séries télévisées. Comment faire confiance avec cette distance physique ?

Tout d’abord, les plus sceptiques pourront se rassurer avec tous les KPIs disponibles dans les CRM ou autres outils de gestion. Il n’a jamais été aussi facile de contrôler et mesurer le travail de son équipe. Mais est-ce vraiment nécessaire ? Un de mes premiers managers avait l’habitude de dire « Comportez-vous en maître d’école et vous aurez des élèves turbulents. » Plus vous mettez le curseur sur la confiance et plus vous aurez des collaborateurs autonomes, engagés et constructifs, prêts à soutenir l’entreprise dans les moments de crise.

La crise, révélateur de managers-acteurs

« C’est quand la mer se retire qu’on voit qui nageait nu » attribuée à Warren Buffet, cette maxime à elle aussi tout son sens actuellement. Les as de la politique interne, les chefs s’appropriant le travail des autres ou encore les « Rastignac » ambitieux qui excellent uniquement dans la forme sont démasqués et leur manque de capacité d’exécution est révélée au grand jour… Caricatural, certes, mais il est vrai que seuls ceux qui savent “mettre les mains dans le moteur”, ceux qui savent faire, bénéficieront d’une réelle crédibilité et de légitimité auprès de leur équipe, de leurs pairs et de leur management. Plus que jamais, les managers doivent être sur de plusieurs fronts en même temps, et celui de l’opérationnel est non-négligeable, sinon prioritaire dans les conditions actuelles.

Le réalisme comme clé de la gestion de crise

Pour conclure, attention à ne pas céder aux sirènes d’un optimisme excessif. S’adapter c’est aussi accepter la brutalité des faits tout en restant ancré dans la réalité, comme l’enseigne le paradoxe de Stockdale. Du nom de l’amiral Jim Stockdale, détenu et torturé pendant la guerre du Viêt-Nam, cette histoire vraie raconte que les prisonniers trop optimistes n’ont pas survécu contrairement à ceux qui étaient restés lucides sur la situation. Oublions donc la méthode Coué et son conditionnement positif pour oser regarder la réalité en face, prendre les bonnes décisions et accompagner les équipes sur le terrain en étant à leurs côtés. Et à petits pas, continuons d’avancer et de préparer l’après.

Pierre Rabozzi

Intervenant depuis plus de 10 ans sur des problématiques RH et recrutement, je suis un jeune directeur passionné par les questions de management et de leadership en entreprise. J’encadre une équipe de consultants spécialisés sur les métiers de la finance et de la comptabilité au sein du cabinet de recrutement Page Personnel.