Gestion des compétences : pourquoi la fonction RH ne peut plus faire comme avant

La gestion des compétences dans les entreprises est un serpent de mer. Elle devient pourtant un sujet stratégique. Si on ne devait retenir qu’un mot pour expliquer cette prise de conscience, le premier mot qui vient à l’esprit est « accélération ». Les entreprises sont attaquées par de nouveaux produits et service de substitution. Les technologies permettent de faire toujours mieux et toujours plus vite, à l’image de ces outils digitaux qui permettent d’automatiser de nombreuses tâches à faible valeur ajoutée. Elles sont accessibles à des petites entreprises à faibles coûts. Les mutations d’usages et de comportements induites par les startups ou plébiscitées par les consommateurs ouvrent de nouvelles opportunités. Ce sont autant de nouveaux défis pour les entreprises en place. 

Ces mutations de technologies, de produits ou de services sont autant de transformation pour le salarié dans son métier et les connaissances qu’il doit mobiliser. Les entreprises utilisent aujourd’hui, quand elles en ont un, un référentiel de compétence. Ce référentiel permet de savoir qui possède quelles compétences. Il est alors théoriquement possible de proposer des formations pour anticiper tel ou tel changement de métier ou évolution de compétence, assurer l’employabilité de ses collaborateurs et la compétitivité de son entreprise. L’effet serait double. D’abord préparer l’entreprise à prendre de nouveaux virages et ensuite retenir un salarié en le faisant grandir dans son poste, en l’aidant à gérer son chemin de carrière et en lui donnant des perspectives. Seulement voilà, ce processus vertueux n’est que théorique. 

Ce processus nécessite un référentiel des métiers de l’entreprise, à jour. À jour des compétences nécessaires aux métiers de l’entreprise et à jour des salariés qui exercent bel et bien ce métier ou cet autre métier. Si ce dernier point tient d’un pointage rigoureux des assignations de poste, il n’en demeure pas moins bancal dans de nombreuses entreprises. Le premier point tient lui de la quête du graal : comment maintenir un référentiel de compétences à jour alors que de nouveaux modèles, de nouveaux frameworks, de nouvelles normes ou de nouveaux outils sont créés par les marchés tous les jours et mis en œuvre de plus en plus vite dans les entreprises. Il a souvent fallu des mois voire des années à une entreprise pour constituer un référentiel. La mise à jour en temps réel tient alors des 12 travaux d’Hercule et engendrerait des coûts dissuasifs. 

Parce que le référentiel se base sur les compétences utilisées dans l’entreprise. Pour être en phase avec le marché en perpétuel évolution, il faudrait que les départements RH coordonnent l’effort de prospectives des compétences afin d’identifier leurs besoins à priori et non à posteriori. Trop long, trop coûteux et surtout trop complexe à mettre en œuvre. 

Pour cette raison, les ressources humaines ne peuvent plus se contenter de feuilles excel et de livrets de compétences. Elles doivent faire entrer dans leurs usages de nouveaux outils. Il existe aujourd’hui des outils capables de construire en temps réel et de manière autonome des réseaux de compétences. Cela est possible grâce aux nombreuses offres d’emplois et CVs qui circulent sur le web chaque jour. Ces outils vont aller “scanner” ces données (offres et CVs) et enrichir les référentiel pour les mettre à jour des évolutions du marché.. Je ne parle pas de référentiels statiques mais bien d’un réseau interconnecté de compétences permettant d’avoir de la visibilité à la fois sur les expertises des collaborateurs internes mais aussi des partenaires de l’entreprise. Afin d’anticiper leurs besoins de transformation, les entreprises doivent désormais cartographier automatiquement et en temps réel les compétences dont elles disposent.

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Jean-Philippe Couturier

Ingénieur diplômé de l'Ensimag, certifié à l’administration des entreprises à HEC et diplômé de l'INSEAD (AMP), Jean-Philippe est vice-président du conseil d'administration de l’Ensimag, directeur de l’Executive MBA de l’Institut Mines Telecom Business School, chargé d’enseignement et conférencier sur les nouvelles technologies et la prospective. Il intervient notamment à HEC, à l’institut Mines Telecom et à l’université Paris 2 Panthéon-Assas et auprès de grandes entreprises françaises et internationales. Fondateur, investisseur et administrateur de plusieurs startups (> 15 sociétés), Jean-Philippe est également Limited Partner (LP) du fond d’investissement ISAI Venture. Après avoir fondé, développé et vendu InovenAltenor au groupe Orange, il développe aujourd'hui Whoz, une startup spécialisée dans la gestion des compétences grâce à une Intelligence Artificielle.