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Le rôle du soutien social dans la prévention du stress au travail

Le rôle du soutien social dans la dégradation des conditions de travail :

« Le soutien social au travail : un des plus importants facteurs de protection en santé mentale » voici comment a été intitulé le communiqué de presse de l’Association Canadienne pour la Santé Mentale au Québec en 2014.

C’est un fait qu’un faible degré de soutien social au travail engendre un plus grand risque de développer des troubles de santé mentale. Le soutien social est reconnu comme un facteur essentiel à l’adaptation de l’être humain en société. Certains scientifiques le considèrent même, relativement depuis peu, comme une valeur tampon, produisant un effet bouclier contre les événements générateurs de stress (Etude menée en 2006 par la direction générale Humanisation du travail (SPF Emploi, travail et concertation sociale) – Belgique). Ce n’est d’ailleurs qu’en 1990 que Karasek met à jour son modèle en introduisant le soutien social, ou plutôt le manque de soutien social, comme troisième facteur de stress.  D’autres résultats scientifiques ont également mis en évidence le rôle central de l’humain sur le stress au travail. Ce ne serait donc pas nos tâches quotidiennes qui nous stressent le plus, mais le contexte social de travail vécu, alors que notre environnement professionnel devrait, au contraire, nous aider à surmonter les difficultés du travail.

La notion de soutien social peut être traduite d’une double manière. Sociologiquement, il concerne la présence d’un réseau social entourant d’individu. D’un point de vue davantage psychologique, il désigne la disponibilité de “relations aidantes“. Le soutien peut d’ailleurs être de multiples natures : financier, matériel, informatif, émotionnel, affectif, de reconnaissance et d’estime… L’ensemble de ces formes se retrouvent aussi bien dans la vie privée d’un individu que dans sa vie professionnelle à travers ses connections sociales avec les acteurs internes et externes dans l’entreprise.

Notons avant tout qu’il est important de parler de ressenti car la notion de soutien social fait avant tout appel à des éléments d’évaluation propre à la personne, à son caractère, à son vécu et à sa personnalité. Deux personnes différentes, baignant dans des environnements professionnels identiques, ne vivront pourtant pas les choses de la même manière et n’auront d’ailleurs pas non plus les mêmes besoins au préalable. Dans un même ordre d’idée, deux individus confrontés à des situations similaires de stress, n’auront pas forcément les mêmes facilités, ou difficultés, à les surmonter. D’où ici la difficulté de ne pas tomber dans des généralités ou des idées préconçues, mais plutôt de parler de grandes tendances pouvant aider les entreprises à palier d’éventuels problèmes et à repérer des signaux faibles.

Dans tous les cas, lorsqu’il y a stress, les conséquences se feront inévitablement ressentir sur le degré d’implication du collaborateur dans son travail, et donc par voie de conséquence, sur sa performance. Ce stress et le manque de soutien social feront boule de neige : moins le collaborateur se sentira bien dans son environnement professionnel, moins il sera disposé à avoir une attitude positive envers ses collègues. Moins il aura une attitude positive, plus il viendra impacter négativement le quotidien de son entourage professionnel, et ainsi de suite.

 

Des postes de dépenses importants pour les entreprises :

Chaque année, en France, le coût du stress au travail se chiffre donc en milliards d’euros pour les entreprises et l’Etat (coût des arrêts de travail, des maladies professionnelles, ralentissement de la performance individuelle…). Tant de postes de dépenses que les entreprises pourraient contrôler en prenant le problème à la source et en s’intéressant à la qualité de l’environnement social de nos collaborateurs en entreprise.

Des chiffres plutôt parlant si nous regardons l’étude de l’Association Internationale de Sécurité Sociale (AISS), qui a effectué en 2011 un travail auprès de plus de 300 entreprises de 15 pays. Il a été démontré l’intérêt financier à prendre en charge le stress professionnel : le rendement moyen de la prévention et des actions en amont est de 2,2 : 1 euro investi = 2.2 euros gagnés en moyenne, et de 1 à 7 euros pour les extrêmes. De quoi véritablement se poser la question de la mise en place d’une politique sociale en entreprise, outre le fait que cette question est d’abord humaine et éthique, elle est aussi financière et économique pour une entreprise qui doit palier les coûts relatifs aux ressources humaines.

 

Des bénéfices concrets pour l’entreprise :

Le 19e Congrès mondial sur la sécurité et la santé au travail qui s’était tenu 2011 a publié une liste d’avantages qui découlent de l’amélioration des conditions de travail :

  • Plus grande motivation et satisfaction de l’employé (21%)
  • Amélioration de l’image de l’entreprise (21%)
  • Impacts positifs de la prévention des perturbations (19%)
  • Attention soutenue à la qualité, meilleure qualité des produits (15%)
  • Prévention de la perte du temps ou réduction du temps de compensation après les perturbations (14%)
  • Innovations dans les produits (9%)

 

Le soutien social : une responsabilité individuelle à ne pas négliger

Chaque acteur en entreprise a un rôle à jouer dans la qualité de l’environnement de travail (rôle certes plus ou moins important en fonction de son degré de proximité avec le collaborateur). Les entreprises ont donc tout intérêt à s’intéresser à l’ensemble de ces acteurs qui ont une influence sur le bien-être du collaborateur, même aux frontières de l’entreprise : il y a les collègues, les managers de proximité, la Direction… Cependant il y a aussi les partenaires extérieurs, les clients, les fournisseurs… Tant d’acteurs avec qui un salarié est amené à collaborer et qui peuvent influer sur la qualité de son quotidien. Guillet a analysé en 2014 les 6 principaux facteurs auparavant exposés par Hellemans et Karnas dans le but de connaître les facteurs les plus prédominants à l’origine du stress. La conclusion est sans appel. Au top deux de ces facteurs influençant le plus grandement le stress, nous retrouvons le soutien des collègues et celui du supérieur. Mais les autres acteurs ont aussi un rôle à jouer.

Rappelons aussi que la définition d’un soutien social de qualité n’est pas le fait que le collaborateur ait un environnement de travail riche en nombre d’acteurs, mais que les acteurs qui gravitent autour de lui n’aient pas une influence négative sur lui. Il semble essentiel de prendre conscience que chacun de nous a une responsabilité dans le bien-être (ou le mal-être) des individus que nous côtoyons quelques soit l’endroit ou la situation que nous rencontrons, même lorsque que cette dernière nous semble aussi anodine qu’anecdotique (un coup de fil à un fournisseur pour une commande en retard, un dossier à traiter avec un partenaire… une visite à un collègue, une pause déjeuner…). En cela, c’est aussi à l’entreprise de veiller à ce que chacun ait pleinement conscience de son pouvoir sur les individus côtoyés et de rappeler des règles de bienveillance utiles justement, au bien-vivre ensemble. Chacun d’entre nous a donc une part de responsabilité non-négligeable dans sa relation à l’autre, que nous le voulions ou pas.

Face aux difficultés du quotidien, il est grand temps de s’encourager mutuellement, de renforcer ses relations au travail et de faire preuve de solidarité.

Anne-Sophie Bérard
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Anne-Sophie Bérard

Après un parcours académique en école de commerce puis une spécialisation en ressources Humaines au sein de l'IGS-RH, Anne-Sophie a choisi sa voie : celle du conseil aux entreprises. Ce qu'elle apprécie le plus dans son métier c'est de le raconter aux travers d'articles. Issue de la génération Y, elle partage son quotidien, ses expériences, ses interactions sociales et ses bonnes pratiques. Elle souhaite faire partager ses interrogations sur le monde de l’entreprise, avec un oeil qu'elle veut aussi pragmatique que nouveau.